CULTURA AL DÍA

Entretien de Jordi Bataille 2005    [ extrait ]

À l’exposition de la Galerie Edifor vous utilisez comme matériau des ailes de papillons tropicaux entières ou en fragments. Quelle signification ont-ils dans votre peinture ?

Oui, j’ai introduit cet élément naturel, tel quel. C’est l’aile, elle-même et non sa représentation. C’est le papillon en soi avec toute sa beauté. Pendant très longtemps j’ai été paralysée par cette attirance, comme souvent nous paralysent les beautés naturelles. Mais, à un certain moment, de colère, je crois, j’ai détruit un grand papillon Morpho que j’avais à l’atelier et je me suis aperçue que les fragments gardaient leur exceptionnelle beauté. À ce moment là, je me suis sentie capable de les introduire comme fragments dans mon travail. Je les montre souvent dans la chute, au moment ou ils vont disparaître. Le papillon est un être qui vit très peu de temps.
Des souvenirs me reviennent : au bord de la mer, dans la  » pampa « , quand les nuages de papillons arrivent portés par le vent. Parce que le vent de l’ouest, le  » pampero  » qui est très fort les pousse vers la mer et quand ils arrivent, ils prennent l’humidité de l’air, tombent et disparaissent. Parfois, sur l’écume des vagues, il y avait des ailes, des ailes de papillons. Elles étaient vert clair, comme les papillons des champs de blé.

La violence dont souffrent les herbes hautes de tes tableaux peut seulement provenir des latitudes extrêmes, sont elles le reflet des plages désertiques du sud du pays, en Argentine ?

Oui, ce type d’herbes balayées par le vent est le même que j’ai rencontré, comme je vous le disais, en Écosse dans les Iles Hébrides où il y a aussi ces herbes sauvages qui sont comme le reflet du ciel : en ce sens que l’atmosphère intervient d’une telle façon que leurs formes sont à la merci du vent. L’arbre aussi participe de cette interaction, mais la structure rigide du tronc lui permet de garder la verticale, du moins il résiste un certain temps. Les herbes balayées par le vent évoquent les effets de l’atmosphère sur la végétation.

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